Eté 1989, "La Lambada" résonne partout en France et fait chalouper les corps enlacés sur toutes les pistes de danse. Le titre est au sommet des charts, c'est même devenu un tube planétaire mais il est aussi entré dans l’histoire du marketing et du plagiat.
Vitrine de pub
"La lambada" signe l’apparition des tubes de l’été sponsorisés par des grandes marques et symbolise les années triomphantes de la publicité.
L'opération marketing visait à promouvoir Orangina, la boisson pétillante dont les bouteilles en forme de poire sont omniprésentes dans le clip, elles y servent notamment de maracas. La marque était ainsi devenu le premier annonceur à sponsoriser une musique et la danse qui l'accompagnait. Présentée à Dominique Cantien et Étienne Mougeotte, alors directrice artistique et directeur d’antenne de TF1 (privatisée deux années plus tôt). la chanson devint une vraie arme commerciale.
CBS vendit 1,5 million d’exemplaires du 45 tours pendant l’été 1989 en France (15 millions dans le monde). Le morceau se plaça illico en tête du Top 50 et y resta en première place pendant douze semaines consécutives.
Sur les ondes radio, c'était un véritable matraquage : le titre était diffusé 3 fois par jour sur Europe 1 par exemple.
Sur TF1, le clip est passé plus de 250 fois durant les mois de juillet et août 1989. Orangina organisait même des soirées Lambada dans toutes les stations balnéaires.
Impossible de passer à côté de la razzia Lambada cet été-là !
Copié-collé
Quelques mois après sa sortie, il est apparu que la mélodie du titre était un vil plagiat.
Les deux producteurs français, Olivier Lorsac et Jean Karakos avaient flashé pour une chanson lors d’un voyage au Brésil en 1988. Le morceau original en espagnol, "Llorando se fue" ("En pleurant, elle est partie"), datait de 1982 et avait été composé et interprété par un groupe bolivien, Los Kjarkas, composé des frères Ulises et Gonzalo Hermosa. En 1986 , la chanteuse brésilienne Márcia Ferreira et son partenaire José Ari avaient publié une version portugaise du morceau : "Chorando Se Foi". C'est cette version-là que Olivier Lorsac et Jean Karakos ont entendu lors de leurs vacances au Brésil deux ans plus tard.
Rentrés à Paris, les deux amis déposent en leur nom la chanson à la Sacem, sous un pseudonyme aux couleurs brésiliennes "Chico de Oliveira". Mais pour que "Chorando Se Foi" devienne "La Lambada", il fallait un groupe. Ils créent donc Kaoma, avec des musiciens guadeloupéens, martiniquais et sénégalais autour d’une chanteuse brésilienne installée à Paris depuis 1985, Loalwa Braz qui avait le talent de chanter comme Marcia Ferreira.
Loalwa Braz est malheureusement morte carbonisée dans sa voiture en 2017, victime d’un sordide fait divers.
L’orchestration a été retravaillée, la flûte de pan a été remplacée par l’accordéon mais la mélodie n'a pas changé d'une note. Une vraie imposture musicale !
Ci-dessous, le morceau original bolivien de 1982 : "Llorando se fue". Le plagiat est flagrant.
Le scandale éclata en 1990. Et l'année suivante, en mars 1991, les deux producteurs furent condamnés par la justice à reverser leurs droits d’auteur aux compositeurs, les frères Hermosa ainsi que Marcia Ferreira et Jose Ari. Olivier Lorsac reçu même un blâme de la SACEM, fait rarissime.
C'est quoi la Lambada ?
En gros, c'est un mix de salsa, de carimbo et de merengue. Ce genre de musique est apparu sur la scène musicale nord brésilienne au milieu des années 70.
Ca se danse en couple grâce à une chorégraphie très sensuelle et chaloupée où les deux danseurs (légèrement vêtus en général !), se contorsionnent avec des mouvements suggestifs des hanches, lui apportant une note érotique avec ces "frottis-frottas" endiablés !
Parmi les divers danseurs, on a surtout été marqué par le couple d'enfants Chico et Roberta.
Chico et Roberta
Les enfants stars du clip ont entraîné avec eux la planète entière.
De leur vrai nom Washington Oliveira (né le 20 février 1979) et Roberta de Brito (27 avril 1977), ils avaient 10 et 12 ans à l'époque.
Il ont sorti un 45 Tours en 1990, "Frente a frente".
Roberta est devenue vétérinaire à Brasília. Et Chico, prêtre protestant à Espírito Santo, au sud-est du Brésil.
Les voici réunis, près de 30 ans aprés.
Ci-dessous le clip, tourné sur une plage de Porto Seguro, une station balnéaire brésilienne sur le littoral sud de l'État de Bahia.
J'ai trouvé ces parutions sur Chico et Roberta, elles sont issues de magazines allemands.
C'est choquant de voir ces images dénudées de la jeune Roberta qui n'avait que 12 ans, même pour l'époque je trouve.
Parodies
Les inconnus avaient parodié "La Lambada" avec leur "Foumoila", sponsorisée par les préservatif Durex !
Et je ne résiste pas au plaisir de mettre la chanson des Garçons Bouchers, groupe que j'aime beaucoup, avec "La Lambada on aime pas ça", une critique rigolote de ce type de tubes très commercial.
C'était dans une émission "Dimanche Martin". Jacques Martin avait quand même les idées (musicales) larges !
Les tubes de l'été
L'été qui a suivi, en 1990, le sponsoring publicitaire a contribué au succès de la "Soca Dance", interprèté par Charles D. Lewis, toujours pour promouvoir Orangina.
En 1991, Yannick Noah nous gratifiait de sa "Saga Africa".
Il faudra ensuite attendre 1996 pour qu’une nouvelle flopée de tubes chorégraphiés débarquent, notamment avec la "Macarena". Cette année-là, il y a aussi eu "Tic, Tic Tac" de Carrapicho pour faire du sport en rythme. En 1997, Bellini débarquait avec son cultissime "Samba de Janeiro" et Felicidad nous faisait nous trémousser sur son "Dam Dam Deo".